Il faut revoir la fiscalité des entreprises et le droit du travail

Le marché de l’emploi est assez paradoxal : d’un côté, de plus en plus d’ouvriers ont l’impression d’assister à une précarisation de l’emploi. D’autre part, dans certains secteurs (industrie aéronautique), des patrons ont du mal à recruter, soit par manque d’employés qualifiés, soit par manque de disponibilité.

Ce sont les employés qui sont à l’origine du bénéfice des entreprises, quelque soit leur taille. Toutefois, la fiscalité actuelle n’est pas adaptée :

  • Les grandes entreprises reçoivent des allègements fiscaux pour investir sur le territoire. Mais cette incitation n’est pas une obligation. Où est le « retour sur investissement » de l’état (donc de nos impôts) ?
  • Les petites entreprises ne réalisent pas de gros bénéfices en comparaison de leur chiffre d’affaire. Mais ce n’est pas le critère retenu au moment de passer à la caisse.
  • Évolution de l’imposition des entreprises : passage à un impôt progressif sur le bénéfice net plutôt que sur le chiffre d’affaire.
  • Refus d’aide publiques au entreprises qui ne payaient pas leurs impôts sur le territoire.
  • Lorsqu’une entreprise n’est pas en redressement judiciaire ou en « difficulté financière », obligation de financer l’assurance chômage des employés licenciés économiques pendant un an.
  • Mise en place d’un crédit d’impôt aux particuliers qui financent des entreprises. Ce financement doit être reconnu comme une montée au capital. En conséquence, ça doit donner, par exemple, des droits sur les décisions ou les comptes de l’entreprise. Ça ne doit pas s’appliquer si le « généreux donateur » est lié au conseil d’administration ou occupe un rôle opérationnel dans une entreprise.
  • Réduction de la période de préavis en cas de départ à l’initiative de l’employé. Pas de changement en cas de licenciement économique (qui est rarement à la demande de l’employé).

Abaissement de vitesse, dégradation du réseau routier, écotaxe : le prix des autoroutes n’aide pas

Prenez la route des vacances, et constatez le coût de votre péage sur le budget. Et encore, on parle de véhicules légers. Si on parle des poids-lourds qui doivent traverser la France, la facture est très salée. La solution trouvée par les entreprises de transport est donc d’emprunter le réseau routier secondaire, pas du tout adapté à un usage aussi « intensif ».

Quelles sont les solutions trouvées par nos dirigeants :

Ce n’est pas parce que les autoroutes sont gérées sous forme de concessions que les prix doivent rester libres (et flottants). Ces contrats auraient du inclure des clauses de gels, plutôt que de planifier les augmentations sur plusieurs années. Un tarif de régulation fixé par l’état devrait être de mise, car, en plus de garantir que l’ensemble du réseau autoroutier soit au même prix dans toute la France, c’est une première étape pour inciter les usagers à plus « consommer » d »autoroute. Ensuite, on pourra appliquer un principe de « dégradateur , payeur » aux poids-lourds qui surexploitent le réseau secondaire .

Remettons le transport ferroviaire sur des rails

Notre président a lancé le « grand débat » dans la commune de « Grand-Bourgtheroulde ». Cette commune est le résultat de la fusion de plusieurs communes. Petite information concernant la disponibilité des transports : cette commune possède une gare SNCF. De plus, elle est placée sur la ligne Rouen – Caen, symbole du lien entre les deux grandes villes de la régions.

La première fois que je suis allé à Paris, j’avais 16 ans, donc pas de permis,. J’ai pu prendre le train pour me déplacer. Un vrai confort. Aujourd’hui, la gare est toujours active, mais rend service limité, ce qui m’oblige à utiliser plus souvent ma voiture. Car, faute de rentabilité, la SNCF ne souhaite pas exploiter plus les petites gares. Pourtant, l’histoire du chemin de fer français réside dans ce réseau.

Contrairement à ce que certains pourraient penser, la dette de la SNCF est autant due au coût de ces petites lignes qu’aux grands projets nationaux. Mais, pour la SNCF, le remboursement de cette dette est plus rapide à court terme sur une ligne de TGV (service haut de gamme) que sur une ligne régionale (par définition simplement utilitaire). D’autant que, parfois, la méthode de mesure pour valider la rentabilité de ces lignes est douteuse.

Comparons avec le « modèle allemand » (mais celui que nos politiques n’abordent jamais). Les régions, plus autonomes dans un gouvernement fédéral, ont décidé de rouvrir leurs gares. A noter qu’en France, la région Languedoc-Roussillon (devenue Occitanie) a fait un choix similaire. Cela a plusieurs impacts :

  1. Une meilleure rentabilité de ces lignes ( qui ne circulent pas à vide).
  2. Moins de transports individuels, donc réduction de la pollution.
  3. Un réseau routier moins sollicité, donc moins cher à entretenir.
  4. Dans le cadre de l’Allemagne, on a constaté un développement des entreprises le long de ces lignes. Dans une moindre mesure, en Auvergne, j’avais constaté la présence de PME un peu partout le long de l’autoroute A75, sans doute pour les mêmes raisons. Quand l’infrastructure est fiable, les entreprises s’appuient dessus.

Il serait temps d’inciter le secteur du transport à utiliser le « ferroutage« , une méthode qui consiste à embarquer le véhicule sur le train. Bien sûr, en l’état, ce n’est pas toujours faisable. Depuis la gare de Paris Bercy, on peut déjà utiliser ce type de transports. Mais à Montparnasse, ou Saint-Lazare, c’est plus compliqué. Par contre, on pourrait aménager cette solution sur des gares périphériques des grandes villes, comme à Massy (qui est proche de plusieurs autoroutes), ou construire de petites gares dédiées.

Tout n’est pas si sombre. mais on a du travail

Comme je l’avais déjà écrit, si j’ai créé ce blog, c’est à force de constat sur les disparités de notre territoire. Mais je tiens aussi à rappeler les différentes actions menées et dont on ne parle pas forcément :

France Télécom doit renaitre

Autant calmer les esprits, derrière ce titre assez radical, je ne souhaite pas un retour à un monopole national ou une entreprise d’état.

Un peu d’histoire : Avant 1980, chaque nouveau client devait payer le câblage depuis le point le plus proche de chez lui (parfois plusieurs kilomètres). Ensuite, ses voisins n’avaient plus qu’à se faire raccorder sur les quelques dizaines de mètres restants. Alors que la téléphonie fixe était peu répandue, le gouvernement de l’époque lance un plan de déploiement impliquant France Télécom, qui était une entreprise de service public. Le déploiement du cuivre sur tout le territoire a permis aux français de pouvoir communiquer par téléphone. Puis, au début des années 2000, l’infrastructure déjà en place a permis un déploiement massif d’Internet, via l’ADSL. A ce titre, France Télécom a gardé un rôle de concessionnaire, afin d’entretenir le réseau utilisé par la concurrence.

Dans le cadre de l’ouverture à la concurrence, d’autres secteurs comme le gaz (Engie / GRDF), l’électricité (EDF / Enedis) ou les transports (SNCF Réseaux / SNCF Mobilité) ont séparé l’infrastructure et la vente de service. Ce n’est pas le cas dans le domaine des télécoms. Aujourd’hui, à part le réseau cuivré utilisé par l’ADSL, chaque opérateur déploie son réseau en concurrence des autres, ce qui pose deux problèmes (dus à la recherche de rentabilité) :

  1. Dans les zones bien desservies, on a plusieurs réseaux concurrents déployés. Ce sont les clients qui ont payé le déploiement parallèle de ces réseaux (n’oublions pas que l’opérateur déploie si les clients sont présents).
  2. Dans les zones moins rentables (en gros les zones rurales, ou les opérateurs doivent investir plus pour couvrir de grandes zones avec moins de clients), c’est l’inverse qui se passe. Le service n’est fourni que bien plus tard, voire pas du tout.

Exemple personnel : Je suis client Bouygues pour mon mobile depuis 2015, après 16 ans chez Orange. La raison de ce changement n’est pas financière. C’est juste qu’Orange a « arrêté » de couvrir ma zone. Travaillant pour un de leurs fournisseurs, j’avais pu obtenir une carte de couverture. Le résultat ? Des « trous » sur une zone de 10 Km2. L’objectif d’investissement ? Aucun, car « zone non rentable » (je cite la conclusion de l’étude de couverture). Je suis donc parti voir ailleurs. Il est évident que, dans une grande ville, je ne me serais jamais posé ce type de question.

De plus, dans certains cas comme dans le métro de Paris, ce sont des « coûts cachés » qui freinent le déploiement. Il faut savoir que les acteurs publics doivent parfois louer l’espace qui héberge leurs infrastructures. Pourtant, l’union européenne garantit qu’on doit pouvoir disposer d’Internet partout.

Cette situation est valable tant pour le déploiement de la fibre que des réseaux mobiles. Le vrai problème n’est pas la privatisation de l’entreprise, mais la bascule d’une entreprise de service public vers une entreprise financièrement rentable.

Alors, pourquoi faire renaitre France Télécom ?

  • Il s’agirait d’un consortium d’opérateurs sous le contrôle d’un acteur public (comme l’ARCEP). Le but serait de coordonner le déploiement des infrastructures, et de mutualiser les ressources.
  • Cela permettrait d’éviter les déploiements parallèles de réseaux comme on le voit aujourd’hui (du genre « Mon immeuble est fibré Orange. Je suis chez Bouygues Je dois attendre ou changer d’opérateur »). Maintenant, la plupart des opérateurs signent des conventions mutuelles de raccordement.
  • Cela permettrait aux opérateurs de profiter d’un plus grand panel de technologies. On a fibré en masse dans des zones où le FTTLA pouvait déjà fournir du très haut débit. En 2006, on profitait de 30 Mbps descendant et 5 Mbps montants. Ce n’est pas la fibre, mais c’est équivalent à un VDSL2. Ce réseau était déployé dans des villes de toute taille, de 10 000 à 500 000 habitants. Bouygues s’appuyait sur cette infrastructure pour fournir du service dans des immeubles non fibrés. Cet accord a été rompu lors du rachat de Numericable par SFR, ce qui a obligé Bouygues à déployer son propre réseau.
  • L’économie d’investissement faite dans les zones denses (et rentables) permettrait de déplacer ces investissements vers les zones « moyennement denses » et rurales.
  • Une organisation des déploiements en plus gros volume réduirait les coûts.
  • La fourniture des infrastructures par un consortium commun permet aussi d’améliorer la concurrence. En effet, la différence se ferait au niveau des prestations rendues, plus selon un choix « par défaut » (voir mon exemple personnel cité plus haut).
  • On pourrait coordonner le déploiement du réseau en outremer de la même manière qu’en métropole.

Si faciliter la concurrence passe par la séparation infrastructure / vente de services, ce mouvement est nécessaire dans le télécoms. D’autant plus que les enjeux économiques existent. La migration vers l’omnicanal (j’achète sur Internet, je me fais livrer en magasin ou chez moi), la numérisation des services publics, imposent un accès internet efficace partout en France. Les entreprises, comme les particuliers, en ont besoin.

Edit 16/12/2019 : le gouvernement s’apprêterait à soutenir une initiative du genre pour le déploiement de la fibre optique. Une réponse au rachat de Covage par SFR ?