La centralisation nationale n’est pas un problème. Le jacobinisme en est un

Ce titre peut surprendre, surtout que la plupart de mes articles font référence aux problèmes que j’y vois. Mais avec le temps et le temps de la réflexion dû à mon chômage partiel, j’oriente mes propos.

La centralisation nécessaire à la construction du pays

Il ne faut pas l’oublier : avant la Révolution de 1789, toutes les régions disposaient de leurs propres règles :

L’état français a permis d’unifier des peuples différents, mais unis dans leur histoire. Son impact dans notre histoire est donc essentiel.

Dans un état totalement décentralisé (fédéral), on rencontre parfois des surprises. Quelques exemples en vrac :

  • Aux états-Unis, les taxes sont différentes d’un état à l’autre.
  • Il n’y a pas de ministère de l’éducation nationale en Allemagne.
  • La Suisse possède trois langues officielle. Chaque canton peut décider quelle langue est enseignée à l’école primaire.
  • En Australie, dans certains districts, on enseigne le créationnisme en école publique.

Je cite l’Espagne à part. Là-bas, les régions s’appellent « Autonomias ». Les régions disposent d’une certaine autonomie décisionnelle, mais surtout financière.

Jacobinisme, fausse décentralisation, vassalisation

Pour revenir à la Révolution Française, lors de la formation du nouvel état, on a voulu centraliser la gestion de l’état. On a appelé ce mouvement le jacobinisme.

Ce terme continue d’être employé pour designer un état dirigé de manière verticale. Hervé Morin y fait souvent référence quand il demande « plus de décentralisation« . C’est justement ce qui fait évoluer mon discours :

Officiellement, nous sommes « déjà » dans un état décentralisé. Différentes lois sont passées sur le sujet, mais c’est un trompe l’oeil. Car ce qu’Hervé Morin oublie, c’est qu’avoir la liberté de décider sans financement a un intérêt limité.

Depuis la loi sur la décentralisation de 1982, l’état se décharge de certaines responsabilités en les transférant vers les collectivités locales. J’avais cité le cas de l’éducation dans mon article sur les inégalités. Dans la réalité, l’état se dégage tout simplement de ses responsabilités via ce mécanisme. En d’autres terme, ce que l’état ne veut plus gérer, il le transfère, y compris le régalien.

Nous avons un ministère de l’éducation nationale qui décide. Pour mettre en place la logistique nécessaire à la mise en place de ces décisions, les collectivités reçoivent un budget. Mais ce n’est pas un budget dédié, c’est une partie des dotations de l’état.

  • Si la taxe d’habitation est bienvenue pour notre pouvoir d’achat, elle réduit les rentrées d’argent dans la commune. Si l’état réduit sa part, la commune doit choisir quoi financer, l’école ou la nouvelle piste cyclable en centre-ville.
  • Même chose pour les départements, qui doivent choisir entre investir dans la rénovation d’un collège, ou la réfection de la route nationale fraîchement transférée.

Au final, ces différentes collectivités ont de plus en plus de « compétences », donc plus de charges. Mais de même temps, les différentes baisses de dotations asphyxient ces collectivités. Ajoutons à cela le transfert vers le privé de différentes infrastructures. Voilà comment des territoires, qui souffrent déjà économiquement, sont devenus esclaves des aides publiques d’un état empereur. De plus, ces changements vont à l’encontre du principe d’égalité que ce même état est censé garantir.

Quand l’état décide, l’état doit payer

Revenons au cas de l’Espagne. Si chaque région possède une certaine autonomie décisionnelle, elle dispose aussi d’une autonomie financière partielle. Elle devient responsable financièrement de ses choix, mais ne dépense pas d’argent pour financer les services nationaux (justice, défense, etc).

Dans le cas d’une décision prise au niveau régional, citons la gestion des trains normands. Sur le fond, je comprend totalement la prise de position d’Hervé Morin. Au final, les performances ne sont pas toujours au rendez-vous, et le coût discutable. De plus, la région prend une position d’acteur privé. La région Occitanie a fait un choix similaire. Mais personne ne s’est mis d’accord. Pourtant, on parle d’un acteur national (la SNCF) qui a une obligation de service public sur l’ensemble du territoire. Alors pourquoi ces choix divisés ?

Une orchestration en étoile

Ici, je fais directement référence à mon métier. J’orchestre, ça veut dire que je mets à disposition des ressources. Dans mon métier, de la puissance de calcul. Au niveau de l’état, ces ressources sont financières ou logistiques. Comment je dois les distribuer ? Simple : je supervise.

  • Pour surveiller mes machines, j’ai des « sondes ». Elle interrogent mes équipements :
    • Serveurs.
    • Equipements réseau.
    • Applications critiques.
  • A l’éducation nationale, le rectorat devrait interroger :
    • Les écoles.
    • Les collèges
    • Les lycées.
  • Au ministère de la santé, les ARS devraient interroger :
    • Les hôpitaux publics.
    • Les EPHAD.
    • Les maisons de santé.

Le superviseur (le ministère), recevrait alors un état synthétique pour chaque zone géographique. Accessoirement, cette méthode, pourtant centralisée, permettrait de mieux projeter les ressources nécessaire, afin de continuer la garantie du principe d’égalité. Le tout en réduisant les coûts, car on investit là ou c’est nécessaire.

Pour conclure, Non Monsieur Morin, plus de décentralisation ne règlera aucun de nos problème. Puisque le problème n’est pas notre champ d’action, mais les financements nécessaires à l’accomplissement de vos missions pour la région.

La dédensification : quel intérêt pour l’outremer ?

Dernier volet qui concerne les citoyens d’outremer, qu’il ne faut pas oublier.

Si j’ai décidé de parler séparément de l’outremer, c’est qu’on oublie souvent cette partie du territoire. De plus, chacun possède ses spécificités (climatique, géographique, politique ou culturelle).

Il faut savoir qu’un ensemble de lois existent sur le sujet, c’est ce qu’on appelle la continuité territoriale. Mais, à part en Corse (pas trop loin de la métropole), les subventions attribuées ont globalement disparu depuis 2007.

Indépendamment de notre histoire, nous profitons toujours de ces territoires. Grâce à la disposition de ces différents « cailloux » (surnom de la nouvelle Calédonie), nous exploitons notamment les zones économiques exclusives.

Une dédensification apporterait à l’outremer les mêmes avantages qu’au reste de la France. Mais on pourrait y ajouter d’autres opportunités :

  • Moins de séparations familiales provoquées par la recherche d’une économie « plus florissante » en métropole. Cet argument peut sembler exagéré, mais il faut demander leur avis aux « victimes » du BUMIDOM.
  • De meilleures relations avec les acteurs économiques et politiques de métropole, trop éloignés pour connaitre les impacts de certains de leur choix.
  • Moins de déplacements égal moins de CO2. Oui, ça participe aussi à la réduction de notre empreinte carbone.
  • La possibilité de créer de nouvelles relations économiques avec les pays voisins des territoires ultramarins.

Il est temps que chaque territoire profite de ses propres atouts. Répartissons nos resources et nos capacités afin d’offrir une économie autosuffisante partout en France.

La dédensification : quel intérêt pour Paris ?

Après mon premier article sur l’intérêt de dédensifier, cet articles concerne les avantages pour Paris et les grandes agglomérations urbaines. Oui je cible souvent l’ancien département de la Seine, mais ses habitants subissent aussi ce quotidien. Alors quel intérêt Paris y trouverait ?

Cet article concerne toutes les grandes aires urbaines : Marseille, Lyon, Lille, etc.

La dédensification : quel intérêt pour la France ?

Ceci est le premier volet d’une petite trilogie consacrée à l’égalité des territoires. Pour rappel, il ne s’agit pas de répartir les richesses, mais d’offrir les mêmes chances de développement sur tout le territoire.

Travaillant dans l’architecture informatique, je mène souvent des réflexions sur cette question : comment éviter ou supporter une panne ? C’est ce qu’on appelle un SPOF (point de défaillance unique en français). Eviter un SPOF passe souvent par :

  • La redondance : la bascule vers un autre équipement si le principal tombe.
  • La répartition de charge : faire en sorte de répartir les demandes sur plusieurs équipements.

Pour la France, l’intérêt de dédensifier est de « répartir la charge » .

A l’heure où les emplois français sont de plus en plus orientés vers le service et le numérique, il n’y a aucune raison d’attacher certains secteurs d’activité à une région précise.

Parmi les intérêts à dédensifier, on trouve :

  • Une réduction du chômage. C’est compliqué de laisser sa vie derrière soi pour un hypothétique emploi ailleurs. La perspective de pouvoir effectuer son travail dans un rayon proche de chez soi pourrait lancer une nouvelle dynamique d’emploi. L’exemple allemand n’a pas que des qualités. Mais on constate que le taux de chômage est presque équitablement réparti sur le pays.
  • Une baisse de la fiscalité. Comme je l’expliquais dans un de mes premiers articles, financer le chômage coûte de l’argent à l’état, donc au contribuable. Un taux de chômage en baisse permettrait de relancer la consommation, permettant de remplir les caisses de l’état. A terme, nous pouvons donc réduire la dette du pays, ou alléger la fiscalité des citoyens et des entreprises.
  • Une limitation de la désertification des campagnes. Car la répartition de la populations sur des pôles urbains plus petits mais attractifs permettrait de repeupler les zones périurbaines et rurales environnantes.
  • Une meilleure résistance aux aléas climatiques et politiques. Dans un autre de mes premiers articles, je citais le poids de l’Ile-de-France dans l’économie française. Ainsi, un événement climatique, comme une crue centennale, ou politique, comme un attentat, aura de lourdes conséquences économiques sur le pays. D’ailleurs, en 2016, le projet Sequana avait pour but de calculer cet impact. Et encore, il ne prenait en compte que l’impact sur l’Ile-de-France, mais pas les conséquences indirecte sur le reste du territoire.

Comme quoi cette centralisation économique ne repose que sur des fondations fragiles, et peut basculer rapidement. Il est temps de supprimer le SPOF que représente l’économie francilienne.

Les Gilets Jaunes ont plombé l’économie française. Sinon à Paris, ça va.

En novembre, on a vu apparaître le mouvement des « Gilets Jaunes ». Un raz-le-bol généralisé, des personnes désintéressées de la politique qui ont eu besoin de faire entendre leur voix. Sur le fond, je partage largement cette position. Comme je l’ai écrit dans l’article précédent, je n’ai jamais fait entendre ma voix et je veux le faire aujourd’hui. Par contre, sur la forme, j’ai un problème avec la forme : l’économie a souffert, mais pas au bon endroit.

Les journaux ont fait tourner en boucle des images de manifestations qui ont complètement dérapé à Paris. La question de cet article n’est pas de savoir si ce sont les Gilets Jaunes ou des « casseurs indépendants » qui sont à l’origine des dégâts. Par contre, même si les manifestations entraînaient des fermetures de commerces ou des baisses d’activité le samedi, tout « revenait à la normale » le dimanche, et pareil les autres jours de la semaine.

Je n’ai jamais vu la zone commerciale de Vélizy2 bloquée. Pourtant, on y trouve le magasin de grande distribution générant le plus gros chiffre d’affaire de France. Globalement, il n’y a pas de gros blocage en Ile-de-France. Alors que, dans différentes régions françaises (la Haute-Normandie par exemple), les blocages ont été beaucoup plus virulents (au point que Norauto me déconseille de fixer un rendez-vous, par crainte de ne pas pouvoir l’honorer).

Conséquence directe : dans un repartage diffusé dans le 20H de France 2, une présentation de l’impact économique montrait que :

  • En province, la baisse d’activité économique était d’environ 50 % (grande distribution et services).
  • En Ile-de-France, cette baisse d’activité était de 11 %.

Ce point a son importance, car l’Ile-de-France représentait 31 % du PIB français en 2015 (contre 29% en 2008).

En conclusion, en novembre, l’Ile-de-France seule a généré un PBI presque équivalent au reste de la France. Alors que nous ne sommes pas en grande forme économique, l’Ile-de-France a donc pu être largement autonome et n’a (presque) rien senti passer.